Synopsis : Sur un navire marchand, deux hommes et un adolescent se retrouvent pour conjurer l'insomnie. Une présence inconnue échauffe les esprits. Les bêtes s'éveillent. Un sacrifice s'impose.
NOTE D'INTENTIONS DU REALISATEUR
À l'origine de cette histoire, il y avait un fait-divers. Des marins d'un cargo avaient assassiné et jeté à la mer plusieurs clandestins d'Afrique. Au fil du temps, j'ai découvert qu'il s'agissait d'une pratique assez fréquente en mer. Or je me suis rendu compte assez rapidement que ce qui m'intéressait le plus, c'était de saisir ce qui se jouait dans l'intimité des personnages, dans un univers exclusivement masculin : à savoir la violence, la culture de la virilité et la transgression des normes.
Dans les foyers d'accueil pour jeunes en difficulté autant que sur les chantiers de construction où j'ai travaillé, les hommes, mais surtout les jeunes hommes éprouvaient le besoin de s'affirmer par la confrontation, de se lancer des défis, de prendre des risques. Des attitudes qui mettent en danger soi et autrui. Comme si pour s'affirmer vivant il fallait côtoyer la mort. Et comme si, l'absence des femmes, la frustration sexuelle, exacerbait ce désir.
Le marin est dans ce sens en situation extrême. Loin de tout, isolé, il vit dans un temps et un univers à part. Entouré de l'immensité, il n'en est pas moins prisonnier de l'infime espace du bateau, confronté sans cesse à la promiscuité avec les autres marins. Le moindre écart peut constituer un danger pour l'équipage et le bateau, d'où un code particulier et très strict.
Le film est d'abord un huis clos. Les trois hommes pour supporter leur solitude n'ont pas d'autre choix que de se retrouver entre eux. Alors, ils trompent leurs angoisses avec l'alcool et des jeux stupides, masquent leur faiblesse par la frime et la vantardise et cachent, honteux, le désir qu'ils ont de la tendresse.
Le jeu des acteurs : je pars du principe que les personnages ne sont pas exclusivement des brutes ignares. Ils sont entiers -- riches d'histoires personnelles uniques et intelligents à leur façon. S'ils agissent ainsi, c'est que, dans leur face à face, l'intelligence n'a pas de place, car elle est l'attribut du faible.
J'aimerais jouer sur le contraste entre un environnement froid et immuable (la nuit, la mer, le métal, la lumière des néons) et l'atmosphère surchauffée d'un espace confiné où les corps s'agitent, turbulents et passionnés. Pour filmer ces personnages intranquiles, j'aurais recours à une caméra portée à l'épaule qui me permettra d'aller au plus près des corps et des gestes.
Je souhaiterais tourner dans un décor réel, en situation réelle. Je voudrais tourner sur un vrai bateau en mer, en équipe réduite avec des moyens réduits, de façon à alléger la partie technique du tournage. Je suis persuadé que tourner dans ces conditions, c'est-à-dire dans les conditions des personnages de mon film, nous permettra de tenir un propos cohérent et crédible, la caméra devenant plus témoin qu'acteur.
