Né un 31. décembre 1971 à A. (un bled de la Basse-Normandie où je n’ai plus jamais remis les pieds) d’une mère française et d’un père tchèque qui voudra rapidement retourner au pays. Jusqu’en 1999, année de naissance de mon fils cadet, je serais principalement un pragois.
L’enfance c’est d’abord l’ennui (c’est la «normalisation» d’après le Printemps de Prague) et l’attente d’un évènement majeur qui mettrait un peu d’animation dans la grisaille, jusqu’au jour où, à 14 ans, une pipe au bec, je me fais virer du café Slavia. Je commence à écrire, à taper et colporter des samizdats, à participer à des concerts clandestins et à rêver de devenir un grand dissident, une sorte de héros. Et pourquoi pas, après avoir bien profité de la vie, un martyre.
J’accompagne des journalistes étrangers qui veulent interviewer les dissidents, je traduis. Puis j’assiste de près à l’exode des Allemands de l’Est, réfugiés à l’ambassade de l’Ouest. Je rencontre un faux yogi, agent de la police secrète qui prédit la chute du mur de Berlin. Le mur tombe effectivement. Après une déception amoureuse, j’écris un court premier roman. Je le publie dans la pure tradition du samizdat, en cinq exemplaires. J’accompagne une journaliste interviewer un potentat déchu, qui essaye de me convaincre que ce n’était pas la jeunesse qui était dans la rue mais des provocateurs occidentaux. Je lui dis que je faisais partie de cette jeunesse. Sa main est moite.
Je commence par étudier la sociologie mais j’abandonne au bout d’un an, car je suis mauvais en calcul des statistiques et par appât du gain, car je commence à travailler sur des tournages de films. En plus d’être très bien payé, c’est assez excitant. J’en oublie d’écrire. Je vis de traduction de scénarii, je deviens assistant réalisateur sur des tournages français (Benoit Jacquot, Denys de la Patelière…). Je rencontre ma compagne et future mère de mes enfants à cause d’un livre de Daniil Harms: bref, elle croit que je suis russe et l’idée la séduit.
Voulant me sédentariser, je deviens responsable d’un projet de création d’une salle de cinéma européen à Prague, je distribue quelques films jusqu’à ce que le projet tombe à l’eau, faute de fonds pour soudoyer les nouveaux décideurs. Mes concitoyens pendant ce temps perdent leur temps à visiter les supermarchés qui sont les plus nombreux par tête d’habitant en Europe. Dépité, je quitte le pays pour la France.
Nous échouons au Port de la Lune à Bordeaux, où nous devenons rmistes, subissant alors le déclassement social, comme disent les sociologues. Je suis pris en édition-librairie à l’IUT de Gradignan, mais j’abandonne au bout d’un an, car les huissiers tapent à notre porte, EDF menace de couper l’électricité et que nos enfants méritent mieux que ça.
Je rencontre Thomas Lacoste et le Passant Ordinaire, revue bimestrielle dont je deviens rédacteur et auteur. Mes premiers textes en français sont publiés. Je travaille alors comme éducateur spécialisé avec des gamins en grande difficulté.
Puis on déménage en région parisienne où je retape un pavillon et apprends plein de métiers par la même occasion. Je sais faire un mur en parpaing, un branchement électrique, la plomberie, la menuiserie, et la maison est de gingois ce qui lui donne un charme tout particulier. Je serais quand même encore éducateur, roadie, récolleur, sérurier-métallier, constructeur d’échaffaudages, facteur à la poste. J’ai réalisé deux court-métrages dont un a reçu un Grand prix du jury à Alès et est passé à la télé !
Enfin, en 2012 je suis engagé comme régisseur au Théâtre de la Girandole. Une petite scène généreuse et dynamique qui n’a pas peur des grandes choses. J’y fais mes armes en tant que régisseur lumière et son, je découvre un métier passionnant et riche où technique et humain se rencontrent. Le théâtre, c’est aussi du rêve.
Je commence à lire mes textes à haute voix et à ma propre stupéfaction, je découvre le plaisir d’être sur scène. Je participe comme comédien à différents projets, principalement avec la compagnie Eau-I.D.A.
En tant que régisseur je fréquente d’autres scènes, le Théâtre des Roches, le Théâtre Berthelot, le Théâtre de la Noue et collabore avec plusieurs compagnies. Trois mois de formation au CFPTS («Régies techniques du spectacle») éveilleront mes envies d’apprendre et seront un sérieux coup de pouce pour la suite. En octobre 2016 j’intègre le Studio Théâtre de Vitry en tant que régisseur général. Un lieu de création stimulant et une belle équipe au service des artistes, sous la direction de Bérangère Vantusso.
Le soutien de l’Association Beaumarchais- SACD à Trop de zef confirme mon intuition que ce texte peut vivre sous diverses formes et m’encourage à reprendre la plume pour donner vie à d’autres histoires …
